[Témoignage] La manade de la Saliérène, marque accueil du Parc naturel régional de Camargue

Les manades de taureaux, mode d’élevage extensif caractéristique du territoire, ouvrent leurs portes et proposent un accueil du public depuis de très nombreuses années. Cependant, les clientèles ont évolué : à l’origine, les activités liées à la pratique de l’élevage étaient uniquement fréquentées par des adeptes de la culture « bouvine », des connaisseurs, tandis qu’aujourd’hui, la culture camarguaise attire toujours plus de visiteurs, dont un grand nombre de personnes extérieures au territoire, non sensibilisé à cette culture locale. Nous sommes donc passés d’un public averti à un public néophyte. Il y a donc une nécessité de rendre accessible la compréhension de l’activité (courses camarguaises, tradition gardianne..). Ainsi, le Parc naturel régional de Camargue, très impliqué dans le maintien de l’activité liée à la culture bouvine comme identité du territoire, a développé depuis quelques années un marquage spécifique qui permet aux publics d’identifier et de reconnaitre les prestations de qualité.

C’est dans cette logique que l’accueil du public dans les manades de taureaux a fait l’objet d’un marquage « accueil du parc naturel régional de Camargue », approuvé par la fédération des Parcs naturels régionaux de France. Depuis 2003, le Parc a attribué cette marque à 15 professionnels du territoire. Nous sommes allés à la rencontre de l’une d’elles, la manade Saliérène, afin de comprendre ce que peut apporter une telle démarche aux professionnels exerçant sur le territoire d’un Parc, ce que cela a pu changer dans leur façon de travailler et comment ils ont pu gérer les éventuelles contraintes.

L’exemple de la manade Saliérène

André et Françoise Peytavin, sont éleveurs de taureaux de Camargue. Ils sont à la tête d’une « affaire de famille » de plus de 80 ans sur le territoire du Parc naturel régional de Camargue et possèdent ce marquage depuis quelques années. Pour eux, la volonté de s’inscrire dans cette démarche et d’adhérer s’est faite à l’origine, lorsque le Parc a instauré le marquage de ces prestations. En effet, depuis plusieurs années Françoise Peytavin s’implique sur son territoire et reste attentive aux initiatives portées par le Parc. Pour eux, le marquage n’a rien demandé de changer dans leur fonctionnement : «  C’est justement parce que nous avions ce mode d’élevage et cette façon de partager notre métier avec le public sur ce qui nous passionne que nous avons obtenu le marquage ». Cette démarche n’a pas nécessité de changement dans leur fonctionnement. En effet, il ne s’agit pas de tout refonder, au contraire, la marque est là pour identifier des prestations de qualité en lien avec les valeurs du Parc.

Une reconnaissance territoriale identitaire

Cette marque accueil du Parc, unique en France et en lien avec la spécificité du territoire renforce le sentiment d’appartenance et le lien au territoire de ces professionnels camarguais. Ce marquage identifie la volonté de transmettre un message riche en sens.

Les professionnels vivent cette distinction avec une certaine fierté, identifiée comme une reconnaissance par le Parc de leur façon de travailler: « en tant que Camarguais nous sommes fiers d’avoir cette reconnaissance pour la qualité de notre prestation ». Il s’agit aussi d’avoir le gout de transmettre et de ne pas négliger les contacts humains avec les visiteurs. « Pour les publics, c’est une garantie, ils savent que s’ils s’adressent à cette manade, nous allons leur consacrer du temps. Ils ne seront pas considérés comme de simples touristes, mais ils vivront un véritable échange ». Les personnes désireuses de connaitre le territoire plus en profondeur font la démarche d’aller à la rencontre de ces manadiers dans l’attente d’un échange simple et authentique. Ce marquage propose une véritable connaissance du territoire au travers d’une activité identitaire de Camargue. La disponibilité des manadiers semble tenir une place centrale dans la transmission des connaissances, en instaurant une relation de confiance, basée sur le respect réciproque, afin faire partager la passion de leur métier aux touristes.

Tendre vers l’excellence

Cette reconnaissance du travail des manadiers leur confère une satisfaction personnelle au travers de la fierté d’être reconnu pour son travail, mais les charge aussi d’un sentiment de devoir envers le Parc afin de toujours être au meilleur niveau. Tout cela renforce encore un peu plus le sentiment d’appartenance de ces manadiers. La marque accueil du Parc signifie que la qualité des prestations est en adéquation avec les valeurs véhiculées par le Parc (territoire valorisé, environnement préservé, dimension humaine privilégiée), ainsi, cela confère un sentiment de responsabilité aux professionnels marqués : « nous faisons attention à tout ce que nous faisons, et cela, à tous les niveaux… Tout est tellement lié ». La marque semble fonctionner comme garde-fou, permettant aux professionnels marqués de toujours avoir pour objectif le maintien des engagements et de tendre vers l’excellence.

Plus-value pour le professionnel marqué accueil du Parc

La communication du Parc vers les publics permet d’identifier et de valoriser les prestations de qualité en adéquation avec les valeurs du Parc. Pour le visiteur, il s’agit d’une garantie. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le marquage ne semble pas présenter de contrainte : « La seule chose qui pourrait s’apparenter à une contrainte serait le fait de toujours continuer de s’impliquer dans la façon de s’occuper de nos taureaux, de respecter le milieu naturel, de permettre aux visiteurs d’avoir une meilleure compréhension du territoire et de nos activités… ». Il s’agit, pour les manadiers marqués, d’une réelle implication humaine et morale qui renforce encore la volonté de transmettre la passion de leur métier et de leur territoire en maintenant un niveau d’exigence en lien avec les valeurs du Parc. Il s’agit aussi pour les prestataires marqués de continuer d’exercer leur métier le mieux possible, en adéquation avec une volonté territoriale de penser un développement plus durable.

Article publié dans TER Durable n°7. Delphine Berlioux.